"Une famille presque normale" de M.T. Edvardsson

Résumé :
Il n'existe pas de famille normale.
Faites connaissance avec la famille Sandell. Le père, Adam, est un pasteur respecté dans la petite ville de Lund, en Suède. Sa femme, Ulrika est une brillante avocate. Leur fille, Stella, dix-neuf ans, s'apprête à quitter le foyer pour un road trip en Asie du Sud-Est. C'est une famille normale, une famille comme les autres. Et comme toutes les autres familles de la ville, les Sandell sont horrifiés quand un important homme d'affaires, Christopher Olsen est retrouvé assassiné. Ils le sont plus encore quand, quelques jours plus tard la police vient arrêter Stella. Comment pouvait-elle connaître Olsen, et quelles raisons auraient pu la pousser à le tuer ? Il ne peut s'agir que d'une erreur judiciaire.

Extrait :
"La salle d'audience numéro 2 est plus grande que ce à quoi je m'attendais. Ma femme est assise, serrée dans l'assistance. Elle a l'air fatiguée, éprouvée. Des traces de larmes sur les joues.
L'instant d'après, j'aperçois ma fille.
Elle est pâle et plus maigre que dans mon souvenir, ses cheveux pendent en mèches emmêlées et elle me regarde d'un œil las. Je mobilise toute mon énergie pour me retenir de courir la prendre dans mes bras en lui chuchotant que papa est là et que je ne la lâcherai plus avant que tout ça soit fini.
Le président m'accueille et me fait d'emblée bonne impression. Il a l'air vif et non dénué de sensibilité. Il semble à la fois capable d'écoute et d'autorité. Je ne pense pas que les jurés s'opposeront à sa décision. En plus je sais qu'il est papa, lui aussi.
Comme je suis un proche parent de l'accusée, je ne peux pas prêter serment pour témoigner. Je sais que le tribunal doit recueillir mon témoignage en tenant compte du fait que c'est ma fille qui est inculpée dans ce procès. Mais je sais également que ma personne, et en particulier ma profession, font que le tribunal accordera du crédit à mes déclarations.
Le président passe la parole à l'avocat. J'inspire à fond. Ce que je m'apprête à dire va influer sur tant de vies durant tant d'années. Ce que je m'apprête à dire va décider de tout.
Je n'ai pas encore décidé quoi dire."

Mon avis :
Suède. Stella, dix-neuf ans, est interpellée et incarcérée pour le meurtre d’un homme trentenaire. Ses parents tombent des nues et ne comprennent pas ce qu’il se passe. Pourtant, leur vie est loin d’être aussi parfaite qu’ils veulent faire croire… Entrainée dans un système qui la dépasse, Stella va avoir le soutien de sa famille et d’Amina, sa meilleure amie. Coupable, innocente, victime ? Qui est Stella et qu’a-t-elle fait ?

Dans ce roman, j’ai rencontré la famille Sandell. Avocate, Ulrika, la mère, est passionnée par son travail et s’investie pleinement. Elle fait passer sa carrière avant la famille et le regrettera durant des moments de tensions à l’adolescence de Stella. Pasteur, Adam, le père, est la droiture incarnée. Il fait tout pour que sa fille se comporte bien et fasse les bons choix. Cette attitude étouffante traduit un profond attachement pour sa fille. Stella, jeune adulte, a un petit boulot et des envies d'ailleurs. C'est une personne entière et dévouée. Cela, elle l’exprime parfois de manière maladroite. Elle a aussi flirté avec le danger, voulant provoquer, faire réagir. Les conséquences ont été compliquées pour toute la famille. J’ai également fait la connaissance d'Alexandra, Dino et leur fille Amina ; les amis de la famille. Amina et Stella sont amies de toujours. Elles ont une relation bienveillante, fusionnelle. J’ai aussi découvert l’homme tué, Christopher Olsen ; ainsi que son ex-petite-amie, Linda Lokind qui a bien des choses à révéler suite à sa relation avec Chris.

Sombre et oppressante, cette intrigue nous entraine auprès des Sandell ; une famille comme tant d’autres… pas parfaite donc. Quand on gratte un peu le vernis, on aperçoit des failles (traumatismes, disputes, secrets, non-dits…). Tous les éléments passés auront un impact – plus ou moins important – sur l’affaire d’aujourd’hui. Dans une ambiance pesante, on suit donc avec intérêt ce foyer, plus particulièrement le quotidien de Stella, leur fille unique. J’ai ressenti diverses émotions en la découvrant ; une chose est sûre, elle est aimée et ce sentiment est puissant. Les points de vue de chacun permettent de rassembler les pièces du puzzle et de comprendre tous les tenants et aboutissants. Entre rebondissements et suspense, je ne me suis pas ennuyée une seconde ; j’avais une sensation d’urgence et d’angoisse omniprésent. Le dénouement vient parfaire l’ensemble et s’agrémente d’un épilogue satisfaisant.

J’ai beaucoup aimé la lecture de ce roman. Sa construction permet de tenir en haleine en distillant progressivement des renseignements. Petit à petit, je me suis alors prise au jeu des suppositions. Entrainée dans l’histoire, j’ai appris diverses informations ; j’ai ainsi pu affiner mes hypothèses tout en me posant encore plein de questions. Les personnages sont peu nombreux, mais on peut aisément imaginer différents scénarios. J’ai particulièrement aimé la composition du récit : trois grandes parties, trois narrateurs : le père, la fille, la mère ; trois voix, trois points de vue. Cela a été combiné de façon judicieuse pour captiver et attiser la curiosité jusqu’au bout. De plus, les personnages ont tous quelques chose d'attachant ; il est difficile d'avoir un avis tranché les concernant. J’ai assisté à un vrai bouquet final avec les révélations. Soignée, la plume de M.T. Edvardsson est agréable à lire. C'est une belle découverte.

Du livre à l'écran 
Ce livre a été adapté en mini-série Netflix. Comme souvent avec une adaptation, j'ai été déçue. Si le fond de l'histoire est similaire au roman, on perd l'intérêt de la narration à trois voix - même si il y a quelques touches faites d'une autre manière. La construction conserve l'alternance passé/présent et le rythme plutôt lent. Toutefois, certaines révélations arrivent un peu trop tôt et gâche l'effet de surprise lors du dénouement. Surtout, la personnalité des protagonistes a été modifiée ; ils n'ont pas les mêmes rôles, réactions et comportements, ce qui est dommageable - et particulièrement en ce qui concerne les femmes. J'ai trouvé qu'elles perdaient en caractère, en détermination et en courage - en clair, elles m'ont semblées plus "faibles"...

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